mardi 21 février 2012

Le pantalon troué

Deux pantalons, deux! Avec des trous aux genoux. Ceux d'Albert, en faisant le lavage que je m'en suis aperçue. De beaux petits pantalons cargos qu'on a acheté cet été tellement pas cher au retour des vacances.

En les mettant de côté, je me suis mise à fouiller dans sa garde-robe. Pour finalement en retirer un autre pantalon, trois chandails, une chemise et quatre culottes. Ces vêtements n'avaient pas de trous, ils étaient déjà trop petits.

Ce soir là, j'ai poursuivi mon lavage et je suis allée au lit. Pour m'endormir aussitôt.

J'avais un petit bébé dans les bras. Emmailloté dans une doudou en polar avec son petit coco bien rond qui en sortait.

Ces petites têtes pas de cheveux, pas de doute, ce bébé devait bien être à moi.

Albert! Tout nouveau-né. Un Albert qui avait faim. Je lève mon chandail, lui présente le sein. Il ne tourne pas la tête. N'ouvre pas la bouche non plus avec ce geste qu'ils font tous: les yeux clos, la bouche ouverte et la petite tête frénétique qui tourne de gauche à droite à la recherche de leur butin.

"Mais vas-y Albert, prends-le!" que je me disais. Pas un geste. Mais pas de lait non plus, que je remarque tout à coup. Pas de lait du tout, bon sang! Et là je sens ces picotements si caractéristiques du lait qui arrive. Vraiment je les sens dans tout mon être.

Cette mémoire inconsciente du corps. Elle est phénoménale.

Les informations de 6:30 me tirent de mon sommeil. Je me lève, comme chaque matin, je vais ouvrir la lumière dans la chambre d'Ulysse, doucement tirer la couverture d'Éloi et enfin réveiller Albert.

Petit minet qui dort encore dans son énorme lit. Grand petit corps de 5 ans et demi roulé en boule. Je le bécote dans le cou et ça sent le bon pain chaud. Il s'étire. S'étire depuis toujours chaque fois qu'il s'éveille. Exactement comme il l'a fait quand il est sorti de mon ventre, exactement comme il le faisait chaque fois qu'il avait fini de téter.

Petite fleur qui s'ouvre à la lumière du jour.
- Est-ce que t'as faim ce matin Albert?

- J'ai très faim maman!
Je l'ai habillé et je lui ai préparé un immense gruau. Ensuite un tout aussi immense bol de céréales. Et un énorme verre de lait.

De vache.

mardi 14 février 2012

Lent et vite

Je suis en train de faire une recette qui va me prendre le reste de l'après-midi.

De l'agneau braisé (quoi, c'est la Saint-Valentin, tsé). Pour dessert je fais des choux à la crème.

J'ai toujours trouvé ça compliqué la pâte à chou. En terme de choux, je suis inconstante. Pas grave, j'aime tellement ça que je ne me décourage pas d'en faire.

Alors je passe mon après-midi de congé à cuisiner et à faire des recettes compliquées.

L'autre jour, Manon a fait des baguels. Ça fait longtemps que je n'ai pas fait de baguels, mais ce n'est pas de ça dont je veux parler. Plutôt des commentaires qu'elles a eu suite à ses baguels. Ses lecteurs semblaient avides de lui donner une recette moins complexe et plus rapide à faire. Elle leur a dit que non, ça allait.

Pas grave que ça soit long.
Est-ce grave que ça soit long?

Ça plaît beaucoup montrer aux autres comment faire les choses plus vites. Leur dire: pfft, si tu savais comme c'est pas compliqué!

Mais ensuite, on fait quoi exactement? Je veux dire, se dégager du temps pour en faire quoi au juste de si important?

Y'a des choses qui prennent du temps. Qui sont complexes. Longues. En découle une certaine richesse, non? Une satisfaction aussi. Pas une gratification immédiate, un autre type de high, mais une impression de texture et de profondeur.

Je veux une existence profonde et pleine de textures. Pas juste du bonheur. De la complexité et de la richesse.

J'ai plus trop le goût de trouver que la vie passe vite. Ça fait 10 ans qu'elle défile à un rythme d'un bébé par-dessus l'autre.

Alors je me dis que si je fais des tas de choses longues et compliquées peut-être que y'aura juste du présent?

jeudi 9 février 2012

On est seul au sommet - ajout

Demain, il faut que je prépare un déjeuner spécial, particulièrement énergétique, pour mon fils Achille. C'est qu'il participera à une activité très spéciale. Tellement spéciale que la directrice de l'école elle-même nous a écrit pour nous en informer.

Votre enfant aura le privilège de participer à une activité motrice.

J'étais tout excitée pour lui, en lisant ça, tu comprends. C'est pourquoi je réfléchis déjà à ce que je pourrai lui faire manger pour qu'il soit assez en forme pour participer. Parce que ce n'est pas rien, cette activité

favorise le développement global et intégral (cognitif, socio-affectif, sensori-moteur et langagier)


Ouais, ouais. Écrit noir sur blanc.

Tu comprends mon stress Annie?

Mais il y a plus.

Cette expérience lui permettra également de prendre conscience de son corps en mouvement, dans son environnement spatial et temporel, ainsi que de mieux se connaître comme être relationnel, affectif et intellectuel.

Ayoye. Tu penses qu'il doit manger quoi, toi, pour être prêt à se connaître comme être relationnel, affectif et intellectuel? Des gauffres? J'ai pas de gauffrier. Tu crois que je devrais courir acheter un gauffrier?

Quoi? Tu te demandes ce qu'il va faire exactement? Je trouve ta question un peu superficielle. Tsé, à quoi bon faire quelque chose si on ne sait pas POURQUOI on le fait? C'est l'OBJECTIF qui est important, pas la chose elle-même, voyons, tout le monde sait ça! Qu'importe au fond, qu'il saute à la corde, qu'il nage dans une piscine, qu'il joue au basket-ball, qu'il saute en parachute, qui se lance en deltaplan du haut de... du sommet de... du sommet du socio-constructivisme?

Et puis, pour te dire franchement, aucune idée. Je n'ai aucune idée de ce qu'il fera. Peut-être bien que la directrice non plus ne le sait pas. En tout cas, c'est pas écrit dans la lettre. Et quand j'ai demandé à Achille, il n'était pas capable de me répondre. Tu vois, il n'apprend pas à s'exprimer comme du monde, à développer son vocabulaire, à formuler sa pensée, mais au moins il va développer son être rationnel intérieur.

Faut connaître ses priorités en éducation.


Annie ajoute:

À ta place, je lui proposerais une prise alimentaire qui viendra faciliter chez lui l'action des enzymes qui pourront ainsi hydrolyser en nutriments les molécules qu'il aura ingurgitées. L'assimilation de ces derniers, grâce à la dégradation des molécules alimentaires par oxydation-réduction et récupération de l'énergie chimique, permettra à son corps de bien répondre à cette activité motrice.

... Mais t'en fais ce que tu veux, c'est juste mon avis.