mercredi 31 août 2011

Ça revole.

Mon petit Chichou, 5 ans, que d'aucuns appelleraient mon préféré, est un tourbillon. Ceux qui le connaissent savent qu'il habite son corps comme nul autre. Toujours en train de sautiller, de courir, de grimper, de gigoter. On a l'impression en le regardant que c'est un genre de verbomoteur du geste. Un gestomoteur, tiens.

Quand il entre à la maison, Achille, sans arrêter une fraction de seconde son mouvement, il balance sa casquette d'un côté, lance ses souliers de l'autre, laisse tomber son manteau en sautillant jusqu'au salon où il grimpe sur le divan.

Quand il sort de la voiture, au lieu d'avancer par le chemin le plus court comme tout le monde, il grimpe sur le dossier du siège de son frère, se faufile entre le toit et l'appuie-tête, pose ses pieds sur les appuie-bras avant de sauter sur le trottoir. Une course à obstacle.

Quand on marche main dans la main, j'ai l'impression que nos deux bras liés sont comme une laisse au bout de laquelle il y a un petit chien fou. Il sautille, fouine partout, tire mon bras pour ramasser quelque chose sur le sol, tombe en bas du trottoir. L'effet est décuplé si dans l'autre main j'ai celle de son petit frère qui marche sagement à mes côtés en papotant sans arrêt.

Il bouge même quand il dort, Achille. Le matin, son lit, pourtant bien fait la veille, n'a plus la moindre couverture. Les draps pendent partout, son oreiller est à terre, sa doudou sous le lit. Contraste frappant avec le lit de sa soeur qu'on se demande presque si elle a vraiment dormi dedans.

Achille, c'est un oiseau mouche, c'est le Vif d'or dans un match de Quidditch, c'est PK Subban chez le Canadien mais en plus petit et en plus pâle.

"Achille, il a un spring dans le derrière." dit mon homme.

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Quand on était en Gaspésie, j'avais décidé qu'on allait sortirau moins un soir dans un bon resto. J'avais ordonné à tous d'apporter une tenue plus chic. Ils ont obtempéré pour me faire plaisir. Des chemises pour les hommes. Des robes pour les filles. J'avais mis dans ma valise une belle veste blanche, au fin fond de mon sac pour la garder à l'abri de la vie de camping. Fait frais, en Gaspésie, je me disais. Ç'allait être parfait agencé à ma jolie robe aux motifs bleus et mes talons cognac.

On s'est arrêté dans un endroit avec une vue magnifique.


Mais mes enfants étaient encore plus beaux à voir.





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En attendant de se faire servir le repas, les enfants se sont enfuis pour jouer dans un coin. Quand Achille est venu en éclaireur demander si on allait bientôt manger, la bouffe était justement en train de se faire déposer sur la table par d'autres mains que les miennes.

"Va avertir tes frères et ta soeur que c'est l'heure de manger!" ai-je dit.

Vif comme l'éclair, se faufilant entre deux tables, Achille est parti vers le reste de la gang en criant "On mange!"

Aussi vif, il est revenu, se faufilant à nouveau entre ma chaise et le serveur de la table d'à côté qui versait du vin à nos convives voisins. Je dis c'est là qu'il est passé, mais à vrai dire, je n'en sais rien, à vrai dire, je ne l'ai jamais vu passer.

Le Vif d'or, je vous dis.

On a entendu "Splash!" et puis "Clingqueling!" et puis "Oh!" et puis on a vu du vin partout.

"Achille!" me suis-je écrié, honteuse.

"C'est pas grave, madame, de lancer le gentil serveur et les voisins. Y'a pas de mal. C'est juste pour vous, votre veste blanche, elle est couverte de vin."

"Avec Achille, tout r'vole." a lancé mon homme, impassible.

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En rentrant au camping, fallait que je fasse tremper ma veste. J'ai vidé la glacière et l'ai remplie d'eau glacée. J'ai versé un peu de savon à linge et y ai trempé ma veste plus complètement blanche pendant toute la nuit, en croisant les doigts.

Et le lendemain matin, je l'ai sortie de là et je me suis dit: "Mon irremplaçable Achille. Je ne le changerais pour rien au monde. Mais quand même. Heureusement que l'eau de javel existe."

mardi 30 août 2011

Chubby Bert et l'intégration à la maternelle

- Pis Albert, comment c'était ton premier après-midi à la maternelle?
- Rien.
- Comment ça, rien. Avez-vous joué?
- Oui, mais rien.
- Pis ton prof, comment elle était?
- Bof, oui.
- Mais Albert, comment tu as trouvé ça la maternelle?
- Pffft, on n'a même pas MANGÉ NOTRE COLLATION!

Jour 15

Rentrée scolaire sous les travaux

jeudi 25 août 2011

Je veux pas te relancer Annie...

... mais nous aussi on est capables d'en avoir des grosses machines.



Ce sont celles de la ville.
Bon, elles sont dans la rue, pas dans notre cour, mais ça nous coûte rien, nous.
Pis c'est quand même le fun.


"Viens manger Popold!"

"Non! Je veux regarder le tratteur."

"Ok. Ça suffit Popold. Viens déjeuner!"

"Noooooooon! Je veux attendre que le tratteur s'en aille!"

Heureusement, il est parti...

Et chez toi?

Jour 10

Ayoye, ça va être benne trop grand!

mardi 23 août 2011

Jour 8

"Quand je vais être grand, je vais conduire des pelles mécaniques"
Oups... J'avais oublié de transférer ma rhubarbe!
Tranchée dans le 514

samedi 20 août 2011

La tourtière et l'idée de la tourtière (2)

Si l'idée de nos plats traditionnels est importante, quelle est cette idée justement?

Un historien me disait que le Québec n'a pas de tradition culinaire mais des traditions culinaires. Le Québec n'a pas d'identité alimentaire, mais des identités alimentaires.

Autrement dit, "manger à la Québécoise", ce n'est pas manger comme au temps de la Nouvelle-France. Cela exclurait de notre répertoire toutes les intégrations que les gens de ce pays ont fait par la suite, et qui sont restées jusqu'aujourd'hui des marqueurs de la culture alimentaire. Comme la tourtière, tiens.

Ou encore la "cuisine italienne" par exemple, celle que l'on fait dans le quotidien aujourd'hui (spaghetti, macaroni, pizza): eh bien elle est présente dans les foyers québécois depuis presque aussi longtemps que notre fameuse tourtière. En plus, elle a bien peu à voir avec la cuisine du quotidien que l'on mange en Italie. C'est à dire que nos sauces à spag Madeleine, elles sont beaucoup plus de notre culture que d'Italie.

Un autre exemple. Tous nos desserts sucrés, eh bien ils sont là parce qu'il y a eu le Régime Anglais. En Nouvelle-France, les colons mangeaient très peu de sucre. Environ 1kg par personne par an. Les Britanniques eux, en mangeaient 6 à 7 fois plus. Ils avaient en plus conservé un goût pour le sucré-salé, absent de la cuisine française de l'époque, et l'intégrait bien dans leurs apprêts. Alors ça pris quelques années de Régime Anglais pour que les Canadiens se mettent à développer leur goût propre pour le sucré.

Notre histoire alimentaire est mal connue. Pas seulement de nous, le monde ordinaire, mais aussi des historiens. On a peu travaillé sur le répertoire historique des plats du quotidien. Et s'il n'est pas réellement important aujourd'hui de cuisiner comme on le faisait en Nouvelle-France, n'est-il pas drôlement pertinent de savoir ce qu'on y mangeait? Et ce qu'on mangeait sous le Régime Anglais, et ensuite au début du 20e siècle?

Ce goût qui nous est propre, celui-là même que nous pouvons offrir au monde, c'est là qu'il prend racine: dans tout ce qui fait qu'on est nous et pas quelqu'un d'autre.

L'auteur Michel Lambert en a fait sa quête. Depuis 10 ans, il écrit une colossale Histoire de la cuisine familiale au Québec. Il a amassé des témoignages de partout au pays afin de dégager une idée de ces plats passés du quotidien. Il me disait qu'il aimerait, un jour, publier ces recettes. Je n'ai pu que l'inviter à le faire! Hachis, fricassées, oies rôties, gâteaux "de Savoie", soupes et potages, autant de plats savoureux véritablement d'ici, que sa formation de chef lui permet d'adapter à la réalité d'aujourd'hui.

- Les bines, c'est ordinaire, ironisait-il, le cassoulet? Ah! C'est merveilleux! Pourquoi avoir honte de ce patrimoine? Toutes les grandes cuisines du monde sont à la base des cuisines paysannes.

Alors. Est-ce que je mange québécois?

Il n'y a rien de mal à ce que l'idée alimentaire québécoise m'habite. À ce que je la transmette à mes enfants. Le hachis que je vous ai fait ce soir? Votre arrière-grand-mère en cuisinait aussi pour ses enfants. Et le pouding aux petits fruits pour le dessert, c'est parce que les Anglais sont arrivés ici un jour que je peux vous le servir.

Y'a rien de mal à être d'ici.

Ah oui, et demain, on mange des sushis.



La tourtière et l'idée de la tourtière (1)

Manges-tu québécois Madeleine?

Je ne parle pas des aliments, mais des des plats. Est-ce que tu manges des plats québécois?


Spontanément tu penses à la tourtière, hein. Ou au ragoût de pattes. Ou à la tarte au sucre. Des mets du temps des Fêtes quoi. Nos plats "traditionnels".

Ce qu'on appelle nos mets traditionnels, ce sont en fait des plats créés au milieu du 19e siècle. Des plats qui s'inscrivaient dans une culture et une époque particulière.

On s'égare. Revenons à ma question: est-ce si important de manger des plats québécois? En mangeant des sushis, est-ce que je trahis mon identité québécoise?

Cette semaine, un sociologue me faisait remarquer en rigolant que si on ne regrettait que la cuisine du temps passé, eh bien on regretterait celle des hommes pré-historique! La cuisine du passée n'était pas nécessairement meilleure. Et donc, continuait ce sociologue, le meilleur est toujours devant, dans ce que ce devant implique de créativité et d'imaginaire. Un peu comme l'arrivée de la tourtière dans les années 1850 s'est faite en rupture de ce qui était avant.

Au fond, c'est peut-être l'idée de la tourtière qui est plus importante que la tourtière elle-même.

Je suis contente d'avoir lu Maria Chapdeleine, mais bon sang que je suis heureuse de ne plus avoir à lire du Louis Hémon. C'est amusant de pouvoir déchiffrer le français que l'on parlait en Nouvelle-France, mais je trouve le langage que j'utilise plus riche et mieux adapté à ma vie quotidienne.

C'est la même chose en cuisine. Je mets des champignons dans ma tourtière et des protéines de soya en plus. Maria Chapdeleine, je te jure que c'était pas sa recette. Aussi, j'ai déjà mis du porc dans mon couscous. Hep.

Autrement dit, je porte une idée de la tourtière, mais dans les faits, je la cuisine une ou deux fois par année comme je l'entends bien. Même chose avec le porc, qui fait drôlement partie de ma culture, que j'intègre dans les mets que je veux bien. Les plats plastifiés, ça n'intéresse personne et je n'en suis pas moins d'ici!

Ceci dit, pour affirmer une identité culturelle, je pense que c'est important collectivement d'avoir un goût qui nous soit propre. C'est la quête de ce goût qui doit nous animer. Quel est ce goût propre au Québec?

Autrement, quelle sera notre contribution au monde si on se met tous à manger comme des Parisiens ou comme nous l'imposent les grands industriels de l'agro-alimentaire? Si l'on parle tous anglais? Si on ne lit que Marc Levy? Si les seuls films que l'on voit sont faits à Hollywood?

Ce n'est pas réellement important de puiser nos plats du quotidien dans le patrimoine alimentaire. Ce qui est plus important, c'est qu'il en reste des traces dans nos coeurs.

Après, on cuisinera bien comme on le voudra!

mercredi 17 août 2011

Jour 2

J'adore ces photos de mes petits qui regardent un travailleur par la fenêtre.
Là où il y avait ma cuisine d'été.

mardi 16 août 2011

Le barbecue est un sport dangereux

Il y a deux ans, notre petit barbecue au charbon de bois, passé de propriétaire à propriétaire depuis plusieurs années, est décédé. Ça nous faisait pas grand chose, à vrai dire, puisque, mon homme et moi, on n'était pas tellement barbecue.

Mais l'année dernière, tout a changé. Parce que l'année dernière, on a décidé de s'en racheter un. Comme on n'aime pas les affaires cheap, on s'est fixé un budget raisonnable: 250$ soit assez pour s'acheter quelque chose qui dure.

Arrivés chez Canadian Tire comme deux naïfs, l'idée ne nous a jamais effleurés que rendu à la mi-juillet c'était déjà la fin de la saison. Sur le plancher de CT plein de beaux fours barbecue... à moitié prix. Pour 50$ de plus que notre budget initial, on a donc pu se payer un beau gros barbecue Cuisinart en stainless avec un rond au gaz sur le côté, des belles grilles en fonte et un thermostat sur le dessus. Du genre qui cuit 22 hamburgers, tout égal, en même temps.

Notre barbecue, y torche. Tu l'allumes et 5 minutes plus tard, il a déjà atteint 500 degrés F. Il est beau. Il brille. On l'aime.

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"Tu vas voir!" m'avait promis ma soeur." C'est génial le barbecue. C'est ton homme qui va cuisiner!"

Sauf que pas chez nous. Mon homme, son barbecue, il le nettoie au printemps minutieusement, il l'abrille chaque soir consciencieusement, il le sort du garage en mai et le place au niveau sur des dalles, il va faire remplir les bonbonnes, s'assure après chaque usage que tout est bien fermé, et le range pour l'hiver, mais il ne cuisine pas dessus.

C'est moi le maître barbecue. Pas que j'y tienne particulièrement. C'est juste comme ça.

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L'autre soir, on a reçu Annie et sa gang pour souper. J'avais vraiment hâte de montrer mon beau barbecue à son homme. J'aime ça rendre les autres jaloux, parfois. Sauf qu'il l'a à peine regarder, le mauzus, trop occupé à parler politique avec le mien d'homme. Trop occupé aussi à aller se perdre en ville à la recherche d'une SAQ ouvert à 18h. Alors, encore une fois, mon beau barbecue a dû se contenter de deux femmes pour le titiller. Sérieux! Pour une fois que je pouvais faire ma fraîche!

Dans ma déception, peut-être, j'ai été inattentive et je me suis brûlée sur le couvercle. Ah pas grand chose. À peine deux centimètres sur mon délicat poignet. Mais quand même, bien comme il faut. Ça a fait une grosse cloche qui a éclaté et puis après je suis restée avec une plaie ouverte. Pas besoin d'un diplôme de médecin pour comprendre qu'il s'agissait d'une brûlure au 2e degré.

Mais ça fait pas vraiment si mal que ça une brûlure. Surtout quand on a bu 3 ou 4 verres de vin. Avant de me coucher, j'ai quand même eu la présence d'esprit de mettre du polysporin et un gros pansement.

"Tu vois, ai-je dit à mon homme, agitant mon poignet comme une pièce à conviction, si c'était toi qui cuisinait sur le barbecue, ça serait jamais arrivé!"

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Deux jours plus tard, la brûlure était toujours bien présente. J'avais beau changer mes pansements consciencieusement, fallait bien que je constate que ça s'améliorait pas ben, ben mon affaire: de la rougeur et de la douleur tout autour, ça faisait même mal quand je bougeais la main. "C'est un peu enflé aussi" a ajouté mon Homme alias Dr Pouf après examen de la région.

"Je vais aller à la clinique du coin voir s'ils peuvent me prendre vite-vite." ai-je lancé sans grande conviction. Je suis sortie de chez moi, fait quelques pas, suis reviré de bord pour aller chercher mon portefeuille, et en sortant la deuxième fois je suis tombée sur G., une voisine infirmière.

"Je peux te consulter G.?" ai-je lancé à ma souriante voisine qui a regardé ma blessure, s'est exclamé ouain c'est pas ben beau ça mais c'est rouge juste autour y'a pas l'air d'avoir d'infection polysporin pansement hermétique garder humide et stérile pourquoi tu irais pas montrer ça au pharmacien avant d'aller à la clinique pis comment tu t'es fait ça?

"Sur le barbecue."

"Quoi? Comment ça c'est pas ton Homme qui cuisine sur le barbecue?"

"C'est bien ce que je lui ai dit!"

"Je savais bien que ça finirait pas être de ma faute!" s'est exclamé celui qui avait tout entendu par la fenêtre ouverte.

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Le pharmacien, Annie. Pourquoi j'y pense jamais? Dans notre système de santé un peu mal foutu, c'est le professionnel le plus facilement accessible. Lui et ma voisine infirmière.

La pharmacienne s'est penché sur le poignet que je lui ai tendu par l'ouverture qui sert pour les consultations. Elle m'a dit la même chose que G. En ajoutant que si ça ne s'améliorait pas, je devrais consulter un médecin le lendemain. Et puis elle a demandé.

"Comment vous vous êtes fait ça?"

"Sur le barbecue."

Elle a rien dit, pas un mot, restée de glace. Mais je pense que j'ai vu dans son regard passé un ben voyons comment ça c'est pas votre homme qui cuisine sur le barbecue, mais sans plus.

Une vraie professionnelle Annie.



samedi 13 août 2011

Le pain naan

Quand on sait faire du pain, pourquoi s'arrêter à la miche?

Le pain est à l'aliment à la base de nombreuses sociétés. Son histoire se confond avec l'Histoire tout court et savoir faire du pain, c'est aussi pouvoir explorer des hommes et des lieux.

Pour mon anniversaire, Madeleine m'a offert ce livre. Ze livre.
La cuisine indienne est goûteuse et multiple. Avant d'avoir ce livre, mes découvertes se faisaient encore beaucoup dans les nombreux bons restos indiens qu'on trouve dans le 514.

Cette semaine, j'ai eu envie d'essayer de faire des pains naans. Le naan est un pain plat, fait de farine de blé. On le trouve dans plusieurs régions d'Asie centrale et d'Asie du sud. En occident, on connaît surtout le naan dans sa variante punjabi, celle-là même que l'on retrouve dans les restaurants indiens. Depuis quelques temps à mon épicerie, on vend aussi du naan. Il fait quand même l'affaire.

En théorie, le naan se fait dans un "tandoor", qui est un four en terre cuite en forme de jarre.
Traditionnellement, le tandoor est enfoui dans le sol. Un peu comme Madeleine en camping, cuisiner avec le tandoor implique la maîtrise du feu. Il faut l'alimenter pendant quelques heures en braises jusqu'à ce qu'il devienne très chaud. Les aliments sont ensuite introduits une fois le feu éteint, contrairement à ce qu'on voit sur la photo.

Bon, je n'ai pas de tandoor. Je n'en aurai même pas dans ma cuisine de Maison de rêve®. Je n'ai qu'un four réparé par Jean-Guy Rochette et il fait très bien l'affaire, merci beaucoup.

J'ai donc fait du pain naan et j'ai eu beaucoup de plaisir. Entre autre celui d'entendre ma petite fille dire sans cesse "petits pains naan" d'une façon vraiment cute (ce qui rachète drôlement pour tout le reste).
Recette de naan (10 pains)

500g (4 tasses) de faire tout usage
310ml (1 t. 1/4) de lait
2 c. à thé de levure à pain
2 c. à thé de cumin noir (facultatif)
1/2 c. à thé de poudre à pâte
1/2 c. à thé de sel
1 oeuf, battu
2 c. à table de ghee (ou d'huile)
185ml (3/4 de t.) de yogourt nature bien riche

Chauffer le lait à température du corps.

Mettre la farine dans un bol et y creuser un puit. Ajouter la levure, le cumin noir, la poudre à pâte et le sel à la farine.

Dans un autre bol, mélanger l'oeuf avec le ghee et le yogourt. Verser ce mélange dans la farine en y incorporant 1 tasse du lait tiède de façon à former un pâte molle. Si la pâte semble trop sèche, ajouter le restant du lait.

Retirer la pâte du bolle et pétrir environ 5 minutes sur une surface enfarinée. Pétrir jusqu'à ce que la pâte soit élastique.

Placer la pâte dans un saladier huilé et laisser reposer jusqu'à ce qu'elle ait doublé de volume. Cela prendra plusieurs heures (au moins 3).

Chauffer le four à 200C (400F) en y plaçant un plat rempli d'eau. Cela procure de l'humidité pendant la cuisson et empêche le naan d'être sec.

Dégonfler la pâte sur une surface farinée, pétrir sommairement et diviser en 10 parties.

En utilisant le bouts des doigts, étirer la pâte en forme de naan (j'aurai peut-être pu utiliser un rouleau à pâte à cette étape parce qu'au final, j'ai trouvé mes naans un soupçon trop épais).

Déposer deux (ou trois si la plaque est assez large) naans sur une plaque à biscuits graissée. Faire cuire 7 minutes puis retourner les naans et prolonger la cuisson de 5 minutes.

Profiter du temps de cuisson pour former vos autres naans.

Servir avec du poulet au beurre et/ou du tarka dhal.

mercredi 10 août 2011

Les dernières roses

Ces roses sur ma table, ce sont mes dernières. Pas de la saison, mais bien de ma vie.

Hier, j'ai découpé cet immense rosier en pièces. À mains presque nues à sentir ses épines dans ma chair.

Ma voisine, celle qui est née dans cette rue il y a plus de 70 ans maintenant, me voyant travailler d'arrache-pied, me lance:
- Pas de lui aussi madame, vous ne devez pas vous débarrasser de lui aussi...
Hep Mme Germain, de lui aussi. C'est que, comme le cèdre du devant et les lilas du côté, le rosier et tous ces arbustes que je vois chaque jour depuis maintenant dix ans sont dans le chemin.

Dans le chemin de ma maison de rêve.

Alors on arrache. On coupe. On jette.
Des images de cette maison-ci partent depuis une semaine, petits bouts par petits bouts, arrachés à bout de bras par la vigueur de mon marteau ou de ma scie.

Vachement thérapeutique.

Dix ans de cette vie s'envolent d'un coup et ne reviendront jamais. Comme le reste quoi. Dix ans de soupers sur cette terrasse. Dix ans de floraisons. Dix ans d'ouverture de cuisine d'été.

Arrache. Coupe. Jette.

Dix ans d'une maison qui nous a vu arriver deux et qui nous endure maintenant six. Ne vois-tu donc pas, maison, que pour mieux respirer, on doit étouffer ce qui est dans le chemin?

Mais ces roses! Semblables à cent mille roses et pourtant uniques au monde.

- Le rosier, me dit sournoisement ma voisine, il était là du temps de Mme Packon vous savez...
Je me suis quand même arrêtée un instant. Mme Packon. Propriétaire originelle. Elle s'était installée dans cette maison il y a 60 ans pour y vivre jusqu'à sa mort, qui était venue la chercher juste en haut, dans son lit. Bien dans notre chambre là. Celle qui a vu naître trois de nos enfants.

Une mort. Trois naissances. Un rosier arraché. Tout ça tourne.

Et là déjà, je me mets à espérer une renaissance qui me semble, à cet instant, pourtant si loin.

mardi 9 août 2011

Nostalgie

"Z'avez en masse de gaz pour tout le voyage!" nous avait dit le propriétaire de la tente-roulotte qu'on a louée pour notre voyage en Gaspésie.

3 jours après le début du périple, on a pu constater qu'il avait tort.

Qu'est-ce qu'on fait quand on a plus de gaz et qu'on se trouve à 50 km de toute civilisation? On cuit sur le feu, pardi.


"Comme c'est chouette!" ai-je dit à mon homme le premier soir. "Et puis, ça goûte bon, non? On devrait toujours, toujours, toujours cuire sur le feu dorénavant, en camping."

Cuire sur le feu, c'est bon pour l'esprit de famille. Ça prend un papa avec de bonnes compétences de scout (ou de ti-boy de la campagne) pour allumer.

Quelques enfants pour oxygéner afin que la flamme survive.

Et une maman pour apprêter le tout.

Cuisiner sur le feu, tu vois, Annie, c'est un peu comme l'amour. Il faut y mettre du temps, de l'énergie, de la patience, de l'effort.

La cuisine des maisons de ville, avec son banal fourneau à gaz ou à l'électricité, sera toujours pauvre de la gaieté que rayonnait l'âtre antique. Les inventions modernes, si perfectionnées soient-elles, ne remplaceront jamais le bon feu de cheminée ... Leur chaleur pressée, contrôlée, ne saurait provoquer les longues causeries au clair de la flamme.
On peut lire cette extrait dans un livre d'économie familiale publié à la fin des années trente par la Congrégation Notre-Dame.

Les Québécoises ont cuit dans l'âtre, directement sur le feu, jusqu'au milieu du 19e siècle. C'est à ce moment qu'on a vu apparaître les premières cuisinières commercialisées. Le fameux poêle à bois en fonte qu'on voit souvent dans les chalets ou les vieilles maisons québécoises. Un peu comme celui-ci que nous avons vu dans un ancien magasin général.

Le poêle à bois servait à la fois à la cuisson des aliments et au chauffage de la maison. Aussi étrange que cela puisse nous paraître, il a d'abord été accueilli froidement puisqu'on craignait qu'il soit responsable de nombreux maux.

Comme quoi, on a toujours craint la technologie, Annie.

C'est vers 1920, qu'on a vu apparaître les premiers poêle au gaz et à l'électricité. Les familles qui pouvaient se le procurer, ou qui disposaient de l'électricité nécessaire à son fonctionnement, ont dû être bien heureuses de pouvoir utiliser cette merveille de la technologie qu'on pouvait allumer et éteindre à souhait, et qui ne chauffait plus toute la maison.

Bon d'accord, on faisait sans doute moins de veillées au bord du feu, je veux bien. Mais crois-tu ça, Annie, que les femmes qui ont profiter des premiers poêles au gaz ou à l'électricité ont pu regretter l'âtre ou le poêle à bois? J'ai lu ça dans un article:

(...) les femmes qui en bénéficient se retrouvent de plus en plus isolées devant un fourneau qui n'appelle plus la sociabilité engendrée par un appareil autrefois destiné non seulement à la cuisson des aliments, mais aussi au chauffage de la maison.
(L'impact des innovations technologiques sur la vie quotidienne des Québécoises du début du XXe siècle (1910-1940), Suzanne Marchand, Bulletin d'histoire de la culture matérielle.)
À ça, moi je dis, no fucking way.

Ah, c'est très chouette cuire sur le feu un bon soir de camping. Très chouette, oui.

Sauf que.

As-tu déjà essayé, Annie, de bouillir de l'eau sur un ostie de feu? As-tu déjà demandé à ton homme, en manque de caféine, de partir un bon feu à 7h13 du matin? Deux heures que ça prend faire bouillir assez d'eau pour remplir ma minuscule tasse de thé et son énorme bodum. Deux heures. Et pis, l'eau, elle goûte pareil, sur le feu de bois ou sur le feu à gaz.

C'est juste au moment où il allait abdiquer et s'enfiler deux bons Coke tout froids qu'il a déclaré en trempant son index dans la casserole : "Bon, elle est assez chaude pour le café, cette eau-là."

Le même après-midi, c'est avec plaisir qu'on est allé remplir la bonbonne de gaz au Rona du village. Et on s'est juré que jamais, plus jamais, on ne voyagerait sans une deuxième bonbonne de propane.

Comme quoi, la nostalgie, c'est bien bon pour les soirs tranquilles de camping en famille, mais un peu moins le lendemain matin.