samedi 20 août 2011

La tourtière et l'idée de la tourtière (1)

Manges-tu québécois Madeleine?

Je ne parle pas des aliments, mais des des plats. Est-ce que tu manges des plats québécois?


Spontanément tu penses à la tourtière, hein. Ou au ragoût de pattes. Ou à la tarte au sucre. Des mets du temps des Fêtes quoi. Nos plats "traditionnels".

Ce qu'on appelle nos mets traditionnels, ce sont en fait des plats créés au milieu du 19e siècle. Des plats qui s'inscrivaient dans une culture et une époque particulière.

On s'égare. Revenons à ma question: est-ce si important de manger des plats québécois? En mangeant des sushis, est-ce que je trahis mon identité québécoise?

Cette semaine, un sociologue me faisait remarquer en rigolant que si on ne regrettait que la cuisine du temps passé, eh bien on regretterait celle des hommes pré-historique! La cuisine du passée n'était pas nécessairement meilleure. Et donc, continuait ce sociologue, le meilleur est toujours devant, dans ce que ce devant implique de créativité et d'imaginaire. Un peu comme l'arrivée de la tourtière dans les années 1850 s'est faite en rupture de ce qui était avant.

Au fond, c'est peut-être l'idée de la tourtière qui est plus importante que la tourtière elle-même.

Je suis contente d'avoir lu Maria Chapdeleine, mais bon sang que je suis heureuse de ne plus avoir à lire du Louis Hémon. C'est amusant de pouvoir déchiffrer le français que l'on parlait en Nouvelle-France, mais je trouve le langage que j'utilise plus riche et mieux adapté à ma vie quotidienne.

C'est la même chose en cuisine. Je mets des champignons dans ma tourtière et des protéines de soya en plus. Maria Chapdeleine, je te jure que c'était pas sa recette. Aussi, j'ai déjà mis du porc dans mon couscous. Hep.

Autrement dit, je porte une idée de la tourtière, mais dans les faits, je la cuisine une ou deux fois par année comme je l'entends bien. Même chose avec le porc, qui fait drôlement partie de ma culture, que j'intègre dans les mets que je veux bien. Les plats plastifiés, ça n'intéresse personne et je n'en suis pas moins d'ici!

Ceci dit, pour affirmer une identité culturelle, je pense que c'est important collectivement d'avoir un goût qui nous soit propre. C'est la quête de ce goût qui doit nous animer. Quel est ce goût propre au Québec?

Autrement, quelle sera notre contribution au monde si on se met tous à manger comme des Parisiens ou comme nous l'imposent les grands industriels de l'agro-alimentaire? Si l'on parle tous anglais? Si on ne lit que Marc Levy? Si les seuls films que l'on voit sont faits à Hollywood?

Ce n'est pas réellement important de puiser nos plats du quotidien dans le patrimoine alimentaire. Ce qui est plus important, c'est qu'il en reste des traces dans nos coeurs.

Après, on cuisinera bien comme on le voudra!

1 commentaire:

Manon a dit…

Regretter est une chose... Savoir faire un pas en arrière pour prendre du recul et recadrer les choses en est une autre.

Parfois je crois que foncer droit devant, tête baissée comme un bélier, nous fait parfois rejeter du revers de la main ce qui était moins bon du passé certe, mais aussi ce qui était très bien.

Faire un pas en arrière, prendre le temps de remettre en perspective le passé avec ce que l'on connait maintenant nous amène plus loin au quotidien.

Je n'y vois pas un regret, mais plutôt une intégration plus large.

Merci pour ce billet :)

PS: Ton couscous au porc me fait penser à mes "faux-macaron" fait avec des graines de soya rôties et pulvérisées en poudre au lieu de la poudre d'amande.