vendredi 11 février 2011

Conversations

J’ai déjà raconté comment les choses se passent la plupart du temps autour de ma table. Ce n’est pas toujours facile de rester patient. Bien souvent, je termine mon repas en ayant l’impression d’avoir avaler tout rond, en me souvenant à peine d’avoir pris une bouchée.

C’est fou tout ce que mes enfants peuvent trouver à blablater, le plus souvent les uns par-dessus les autres, dans le chaos le plus absolu, et ce n’est pas toujours intéressant ce qu’ils ont à dire! Parfois, quand même, quelques perles.

- J’ai une blague à raconter, dit Victor, hier au souper. Est-ce que c’est correct si c’est une blague un peu… sexuelle?


- Une blague sexuelle?!? je lui réponds. Mais qu’est-ce qu’ils t’apprennent à l’école? Et puis, que sais-tu, toi, de ce qui est ou n’est pas sexuel?


- Vas-y Victor. Raconte ta blague, dit mon homme en me faisant des gros yeux pour que j’arrête de dire le mot « sexuel ».


- Ok. C’est un petit gars qui va à l’école. Pis là, son professeur lui dit qu’il faut qu’il invente une chanson pour le lendemain. Le garçon, il sait pas quelle chanson inventée, et il y pense toute la soirée. Le lendemain, il arrive à l’école. La maîtresse dit : Qui veut chanter sa chanson? Alors il va devant la classe, il baisse ses culottes et il chante : ‘Ti poisson, ti poisson, ti poisson. En bougeant ses fesses (Victor bouge légèrement son bassin). La maîtresse est fâchée. Elle le renvoie à la maison. Pis ses parents lui demandent ce qui s’est passé à l’école. Alors il raconte qu’il a inventé une chanson. Il saute sur la table, il baisse ses culottes et en branlant les fesses, il chante : ‘Ti poisson, ti poisson, ti poisson. Alors, son père lui dit : C’est pas comme ça mon fils. Il grimpe sur la table, baisse ses culottes et chante : Grosse baleine, grosse baleine, grosse baleine.

Fou rire incontrôlable autour de la table. On a ri pendant au moins deux minutes. En se tenant le ventre. Y compris ma sœur qui était là pour le souper. Quand on a eu fini. Victor lance : La comprends-tu papa? Veux-tu que je te l’explique?

Nouvel éclat de rire.

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Mon fils vieillit. Il commence à en comprendre pas mal de choses. Il écoute aussi.

L’autre jour, je discutais avec mon homme à table. Victor était là, assis en train de manger son souper après tout le monde pour cause de pratique de hockey. On avait une discussion d’adultes. À un moment, mon homme me dit de faire attention, parce que Victor écoute. « J’écoute souvent vos conversations. »avoue-t-il. C’est normal, ti gars. Puis il lance : « Maman, c’est quoi « épargner »? ». Je me mets à réfléchir à toutes les phrases que j’aurais pu dire contenant le mot « épargner ». Épargner les sentiments de quelqu’un? Elle l’épargne pour ne pas le blesser? Il faut qu’elle épargne son énergie? « Dans quelle phrase j’ai dit ça Victor? » « Non, c’est pas toi, dit-il. C’est à la télé. Il parle toujours d’épargne. C’est quoi l’épargne? »

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Ça me fait penser qu’un jour j’étais chez ma sœur pour souper. J’étais débarquée chez elle un soir de semaine, avec la bouffe et mes enfants et on avait fait à manger ensemble.

Être avec une de mes sœurs et cuisiner. J’aime.

On s’est mises à discuter de choses importantes. Un sujet trop délicat pour les enfants. Alors on s’est parlé en anglais. C’est naturel pour nous. Ayant grandi dans une famille bilingue, ça nous vient tout seul.

On est repassé au français le temps d’échanger quelques phrases moins délicates, et puis, ma sœur s’est mise à me parler en espagnol.

Cette sœur-là, c’est un peu une espagnole. Parce qu’elle a vécu 6 ans en Espagne. Elle le parle couramment, à la maison, avec son mari. En gros, elle est trilingue. Pas moi. Mais j’arrive à saisir.

Après m’avoir parlé en espagnol quelques temps, ma sœur s’arrête, réfléchit un instant et dit : Est-ce que je te parlais en espagnol, là? Excuse-moi! Je ne m’en étais pas rendu compte.

Ça va, sœurette. De toute façon, il faudra bien que j’apprenne l’espagnol. Pour que mon intelligent de fils qui sera bientôt bilingue ne comprenne pas quand je dis des choses importantes à son père.

Ballena gorda, ballena gorda, ballena gorda.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Délicieux billet :0)

Merci,

Anne-Marie

Anonyme a dit…

C'est fou comme je me reconnais dans chacun de vos billets ! Chez nous on utilise aussi l'anglais pour se dire des petits secrets devant les enfants mais avant-hier, grâce aux cours d'anglais de l'école, mon plus vieux avait deviné ce qu'on s'était dit ! Comme le papa est mexicain et que les enfants parlent espagnol, je crois qu'on va apprendre le langage des signes....