jeudi 28 janvier 2010

Luminothérapie

L'hiver, comme 3 à 8% de la population adulte nordique, je souffre de dépression saisonnière. Ce trouble, je l'ai hérité de mon père, reconnu pour sa condamnation de l'hiver québécois et pour cette phrase célèbre qu'il prononce tous les 21 juin: "C'était la journée la plus longue de l'année, ma fille, à compter d'aujourd'hui, on sombre vers l'hiver."

Cela fait au moins une dizaine d'années que j'ai compris que je souffrais de trouble affectif saisonnier. Ça ne prend pas la tête à Papineau pour le comprendre. Chaque hiver, je deviens une marmotte. Je dormirais 12 heures par nuit. Je suis plus maussade, moins énergique le jour. Heureusement, avec le temps, j'ai découvert plein de trucs qui m'aident à passer au travers: prendre l'air le plus souvent possible, faire des sports d'hiver ou même du sport tout court, célébrer chaque rayon de soleil (même si une journée ensoleillée signifie habituellement une journée bien froide) et continuer d'espérer, d'avoir confiance, qu'un jour, l'hiver sera derrière moi.

Je me suis acheté dernièrement une lampe à large spectre. Ça m'aide. Mais la lumière que je préfère l'hiver, est celle qui pénètre dans ma cuisine.

La providence a voulu que la propriétaire précédente installe une immense porte-patio dans ma cuisine. Entre décembre et mars, en 11h et 13h, les rayons du soleil sont dans l'angle parfait pour frapper ma porte-patio et inonder ma cuisine de délicieuse lumière. Beaucoup de lumière. Presque trop de lumière. Tellement de lumière que, la plupart du temps, mes enfants me demande de fermer un peu les rideaux pendant qu'ils mangent. Tellement qu'ils me demandent également de manger avec leurs lunettes fumées.



Pour ma part, c'est la fête. À chaque rayon de soleil qui touche mon visage, j'ai l'impression d'être réénergisée.

En attendant le printemps, et à défaut de partir dans le sud, chaque jour qu'il fait beau (et tous les autres aussi), je me paie un petit séjour dans le soleil de ma cuisine bleue.

5 commentaires:

Anonyme a dit…

oh ça tombe a point pour moi cette lecture… l'hiver me déprime tellement! J'ai l'énergie complètement à plat depuis 2 jours! Vive le soleil! Je me dis qu'au moins après le 21 décembre on gagne quelques minutes de lumière par semaine!

Madeleine a dit…

On a passer au travers! Faut pas lâcher!

Annie a dit…

Nous sommes un peuple nordique en plein déni. On vit l'hiver comme s'il n'existait pas, ni n'influençait nos métabolismes.

Le grand Jean Malaurie, qui a vécu 40 ans avec les Inuit, nous dit qu'ils avaient bien compris, eux:

"Ils dorment plus l'hiver. Au moins douze heures par jour. Ils se réveillent vers midi pour profiter des minces rayons qui percent à peine l'horizon. L'été, ils ne dorment que 3 ou 4 heures."

et avec poésie sur la nuit polaire:

"Les Inuit dont on sait les pouvoirs hyperacoustiques dans l'air glacé, m'ont dit percevoir, par temps clair, l'énergie du vide. Une note soutenue, comme retenue. L'aigu d'une corde de violoncelle ou de harpe tendue dans une vibration perpétuelle, un cri de gorge agonistique à l'écho indéfiniment répété de tous les points de l'horizon. Le son est à l'origine du monde, l'ordonnateur du chaos."

IKKUMAHUQ! qui veut dire "Dans la nuit de l'igloo"

Madeleine a dit…

Oui, Annie, c'est vrai que nous avons de la difficulté à vivre notre nordicité. Je ne peux pas dire le contraire. C'est vrai qu'il faudrait accepter de vivre selon deux rythmes (un hivernal, un estival). Nous le faisons un peu, mais sans doute pas assez.

Ce n'est pas l'hiver qui me dérange (j'aime le froid, la neige, les sports d'hiver, j'aime même les journées courtes qui se terminent rapidement, je trouve l'hiver reposant) mais bien le manque de lumière qui a un réel effet sur moi.

Ne crois-tu pas qu'il a aussi un effet sur la communauté Inuite?

Annie a dit…

Je voulais dire que c'est socialement qu'il faudrait l'accepter. Ici, tout doit rouler toujours de la même façon, même l'hiver. Comme si on arrive pas à accepter que l'on doive déployer autrement plus d'efforts/d'énergie/d'argent pour que ça fonctionne de la même façon que l'été.

J'étais tombée sur une étude qui mentionnait que le cycle menstruel des femmes inuit était différent pendant la nuit polaire. À cet effet, anciennement, on observait réellement une saison des naissances dans le Grand nord...

Pour la vitamine D par contre, leur alimentation traditionnelle comblait tous les besoins. Quatre à six livres de poisson/phoque par adulte par jour (toujours selon les observations de Malaurie)! C'est plutôt aujourd'hui qu'on observe des carences... Époque folle où on s'attend à trouver de la laitue à la coop de Pond Inlet, tsé.

Le soleil ayant tellement d'effets sur la nature, comment ne pas imaginer un instant qu'il n'en ait pas sur l'être humain?

Moi aussi j'aime l'hiver. Cette lumière unique de l'hiver de chez nous. Après avoir vécu deux "hivers" allemands, sombres, mouillés et brumeux, j'aime mieux le nôtre!

(même si je prendrais leurs jonquilles de fin février)